Topologie différentielle

8.3 Suite exacte des paires de variétés

Dans cette section on relie la cohomologie d'une variété, d'une sous-variété et de son complémentaire. La partie algébrique de la démonstration est strictement la même, elle consiste à invoquer le théorème 1, mais la partie géométrique demande un peu plus d'efforts et la théorie des voisinages tubulaires du chapitre 3.

Théorème 7
Soit une variété compacte sans bord et une sous-variété compacte sans bord. On note l'inclusion et l'inclusion . On a une suite exacte longue :
où les flèches de proviennent de et les flèches de proviennent de .

Démonstration

On commence par montrer que toute forme différentielle sur s'étend en forme différentielle sur . Soit un voisinage tubulaire de fourni par le théorème 4 et une fonction plateau qui vaut au voisinage de et est à support dans . On note l'inclusion de dans et on considère l'application d'extension

Par construction est un inverse à droite de , qui est donc surjectif. On note le sous-espace vectoriel des formes différentielles qui s'annulent en restriction à . On a donc une suite exacte courte de complexes

Commutative diagram

Le théorème 1 fournit une suite exacte longue qui est presque celle annoncée, sauf que la cohomologie de intervient en lieu et place de celle de . Il suffit donc de montrer que l'inclusion de dans induit un isomorphisme en cohomologie.

Montrons d'abord l'injectivité. Soit une forme fermée appartenant à . On suppose que est nulle dans , c'est à dire qu'il existe nulle en restriction à et vérifiant . On veut montrer qu'on peut remplacer par à support compact dans (car alors est bien nulle dans ). Quitte à rétrécir le voisinage tubulaire considéré ci-dessus, on peut supposer que n'intersecte pas le support de . En particulier . Ainsi est une forme fermée sur . De plus sa restriction à est nulle. L'application qui écrase chaque fibre de sur sa base est une rétraction par déformation de sur . Donc la première partie du corollaire 8 assure qu'il existe telle que . On pose est l'opérateur d'extension défini précédemment. On a bien et donc est dans .

Montrons maintenant la surjectivité. Soit une forme fermée appartenant à . On veut montrer qu'il existe une forme dans telle que est dans . Comme est fermée et , la deuxième partie du corollaire 8 fournit une forme dans telle que . On pose .

On donne maintenant un exemple d'application de cette suite exacte pour calculer la cohomologie à support compact de . On peut faire ce calcul de façon plus élémentaire (mais sans doute pas plus éclairante) et plus calculatoire. Mais on insiste ici sur la magie des suites exactes longues. À partir de la cohomologie d'un point, on a calculé la cohomologie de en utilisant l'invariance par homotopie. En utilisant la suite de Mayer-Vietoris, on a en a déduit la cohomologie des sphères. On utilise maintenant la suite des paires pour déduire de la cohomologie de et la cohomologie à support compact de . Dans toute cette succession de calculs on ne calcule jamais une dérivée ou une primitive d'une forme différentielle.

Corollaire 8
Pour tout , la cohomologie de de Rham à support compact de est isomorphe à en degré et triviale pour les autres degrés.

Démonstration
Soit un point de , vu comme sous-variété de dimension zéro. Le complémentaire de est difféomorphe à donc la suite exacte de paire, fournie par le théorème 7 est:
Commutative diagram
Comme de plus est surjective, on obtient un isomorphisme entre et pour tout et . Le calcul de la cohomologie de dans le corollaire 5 permet de conclure.